68e Semaine Fédérale Internationale de Cyclotourisme de Châteauroux

Récit de Cornelis Van Rijswijk

Châteauroux, contraction de Château Raoul, forteresse qui domine les bords de l'Indre, capitale du Bas-Berry et patrie du maréchal Bertrand mais en ce qui nous concerne, elle sera du 30 juillet au 6 août la capitale de la 68ème Semaine Fédérale et Internationale de cyclotourisme représentant seize pays avec près de 10000 participants, logés en camping fédéral, chez l'habitant ou bien à l'hôtel ou sous les ponts, c'est selon.

Située au bord de l'Indre, la base de loisirs de Belle-Isle accueille le village fédéral, les confréries et les quatre-vingts exposants que l'on visitera au fil de la semaine puisque l'on se rendra chaque jour en fin de parcours à la permanence et principalement à la buvette, lieu incontournable du séjour, écouter les potins du monde.

Dimanche 30 juillet

Quand bon nombre de participants attendent la cérémonie d'ouverture, quelques autres se rendent à La Châtre, aimable capitale du Boischaut Sud, douillettement nichée au "coeur de la vallée noire" chère à George Sand. Trois itinéraires, verts et vallonnés en guise de levée de rideau. Nous optons pour le plus grand 177 Km avec 2500 m de dénivelé environ (ne vous laissez pas impressionner) intitulé les Monts de la Marche. Au cours de cette balade, on n' a pas aperçu de connaissances régionales mais nous avons pu admirer les vignes de Chateaumeillant, le château de Boussac qui surplombe la Creuse, passer par le point culminant du département du Cher, le Magnoux (504 m), les pierres jaumâtres (chaos formés d'énormes blocs de granit) de Toux Ste Croix et son église du XIe, les gorges de la Creuse et le Pont du Diable à Anzême, et bien sûr, La Châtre, la vieille ville, le donjon et les vestiges de l'ancien château, musée George Sand et de la Vallée Noire. De retour chez Marie Reine (notre logeuse) qui nous attend pour dîner, nous avons commenté cette mise en jambe les pieds sous la table, c'est très appréciable j'vous assure. Rendu à la tisane anti-stress, pour accompagner Marie Reine, une bonne question se fait jour, voulez-vous dîner demain soir ici ? Nous répondons positivement à l'injonction, bonne blague, ça nous permettra de flâner un peu plus à la……… Demain on voyagera en Champagne Berrichonne et en Boischaut Nord.

Lundi 31 juillet

Réveil matinal puisque nous avons décidé de cycler sur les longs parcours au cours de la semaine. Marie Reine dort toujours, c'est convenu la veille, on sait faire not' p'tit dèj quand même ! Mais au moment du départ un petit coucou et bonne ballade nous sont murmurés.

Nous sommes à un Km environ de la permanence dans le quartier St Jean, les Castelroussins s'éveillent, il fait frais, lentement on se dirige, empruntant les pistes cyclables, vers la permanence, point de rendez-vous et de départ des circuits, nous sommes assez disciplinés, à l'approche du lieu, les forces de l'ordre sont présents tous les 50 m environ, ça bouchonne un peu mais la circulation se fait correctement, les automobilistes, patients, laissent les quelques cyclos pressés se faufiler entre les voitures mais ils sont aussitôt interpellés par la police municipale qui les redirige sur la bande verte.

Pas de connaissance en vue ! On continue sur notre lancée en pays de Valençay par le bourg médiéval de Levroux, (c'est pas un fromage ça ?) une des plus ancienne cité du Berry qui connut une longue prospérité grâce à la mégesserie et à la fabrication du parchemin. Moustache au vent on continue de pédaler dans la douce et harmonieuse campagne avec ses faux plats, ses petites bosses, jusqu'à Bouges le Château c'est ici que nous nous désaltérons un moment en contemplant la bâtisse de style Louis XV qui évoque le Petit Trianon où on rencontre les copains de Creil et nos amis de Villers, Alain, Milène et Thimoty. La sono envoi de la musique, un animateur s'égosille dans son micro, il n'a jamais vu autant de cyclos. Vous venez d'où monsieur ! Et vous madame !

On traverse le parc, la bicyclette à la main puis on prend la direction de Valençay en passant par le Petit Fromage, ça monte entre colza et tournesols. Les agriculteurs déchaument leur immense étendue sous un soleil voilé, on voit à peine les fermes à l'horizon. On sillonne entre forêts, champs en jachères fleuris et quelques vignes par ci par là, en approchant de Valençay, soudain j'entends une clochette, son timbre augmente, flânerai-je un peu trop ! A ma hauteur il me dit "tu as un beau vélo" c'est pas un vélo, c'est une bicyclette ! Que je lui réponds, il ne faudrait pas confondre. Il m'en fait l'éloge puis me demande si je connais la confrérie des 650, sa clochette commence à me déranger, viens faire un tour sur le stand, j'y suis tous les soirs. Oui peut être ! Tiens un resto avec menu cyclo, allez ! À plus, on s'arrête là.

Quelques pédaleux déjeunent déjà, il est pourtant tôt ! Valençay, son fastueux château et son parc, demeure du Prince de Talleyrand, mais aussi son fromage noir au cœur blanc en forme de pyramide tronqué et son vin, tous deux AOC que nous aurons l'occasion de déguster chez Marie Reine, elle fait les choses bien n'est ce pas ! Il parait, selon la légende, pour ne pas froisser son maître Bonaparte, de retour de sa désastreuse campagne d'Egypte, Talleyrand l'aurait tronqué d'un coup de sabre. Pas commode ce mec ! Tout était prévu, mais à cause de la clochette nous nous sommes arrêtés un peu tôt, nous traversons le centre ville au milieu de cyclos festoyant, encore attablés avec chopes et saucisses, enfumés par les grillades, quelle odeur ! Au moins il y a de l'animation. A quelle heure ils vont rentrer ceux là !

Luçay le Mâle et son musée de la pierre à fusil, c'est à voir, des pelotons nous dépassent vivement, c'est sans nul doute pour éliminer le trop plein d'énergie du précédent point accueil, et nous on continue d'admirer le charme discret des bourgs, des manoirs et châteaux en sillonnant la campagne Berrichonne.

Nous voici arrivés à la permanence, on suit les indications, village fédéral, exposants, parc à vélo à droite et la buvette à gauche en face, grand bâtiment de verre et de bétons, ça change du chapiteau, que je préfère, l'ambiance n'est pas la même, tout fout le camp, nous n'irons donc pas tous les jours comme prévu.

Mardi 1er août

Tiens ! C'est mouillé ce matin la Brenne, pays des 2230 étangs, le paradis des oiseaux avec plus de 270 espèces. Toujours les faux plats, montants et descendants sous le ciel gris et nuageux et le vent d'ouest que nous aurons pleine face jusqu'à Le Blanc, la cité aux pierres blanches coupée en deux par la Creuse. On se croirait en automne, franchement après le mois de juillet caniculaire. « Tiens Villers ! Ca va Thierry, ça roule ! T'es tout seul ? Non Luc est là devant, ah bon ! Je croyais que vous étiez déjà séparés ! Vous êtes sur quel camping ? Le n°1. N'oubliez pas le pot de jeudi à 18h. Salut Alain ! Thimoty est là aussi ! Il est loin devant ! »

St Gaultier, on est sur les bords de la Creuse, c'est là que nous entrons, dans le parc naturel régional de la Brenne. On enjambe la rivière et le point accueil, pour suivre le cours, de Thenay à Romefort, où l'on admire l'imposante architecture du château, puis nous ferons une pause à Ciron devant la lanterne des morts.

Après avoir contemplé les monuments, on continue notre itinéraire sur Pouligny saint Pierre,une autre pyramide AOC, et Douadic. Un regard à droite sur l'étang de la Mer Rouge et ses 160 hectares, nous sommes en pleine nature. A l'écart de la route, nous observons cette étendue, espérant voir quelques espèces de volatile et particulièrement mes cousines, les guifettes moustac parmi les canards, les hérons, les grèbes, etc. Nous traversons quelques hameaux par ci par là, et faisons halte à celui de Bouchet avec ses maisons construites en pierre rouge et visitons la Maison du Parc. On poursuit en slalomant en souplesse d'étangs en étangs sur de petites routes étroites vers St Michel en Brenne, Méobecq, appréciant les superbes chapiteaux de l'abbatiale, avant de prendre un dernier ravitaillement à Neuilly les Bois et de rejoindre les rives de l'Indre à Niherne, laissant les quelques cyclos aventureux se dépatouiller dans le labyrinthe végétal “Pop Corn“.

Allez ! On va faire un tour chez les exposants et à la buvette, des fois qu'il y ait une connaissance, et puis on dîne encore chez Marie Reine ! Ce soir c'est soupe à l'ortuge, poulet en barbouille, un morceau de petit cœur du Berry et en dessert une tarte aux barriaux et aux pruneaux, arrosés d'un petit vin gris, j'vous dit pas la chance qu'on a !

Mercredi 2 août

Brrrrr ! Il fait bien frais, 14°. Aujourd'hui on retourne faire un peu de dénivelé en pays du Val de Creuse, ce sera le parcours le plus accidenté de la semaine, avec une succession de petites bosses.

Direction Argenton sur Creuse, la "Venise du Berry" avec ses vieilles maisons à galeries, en passant voir le pont de bois couvert du XIXe à Pont Chrétien. Un arrêt au point accueil nous permettra de nous réchauffer un peu avec un ch'tio café. « T'as vu la montagne de baguettes ? Ben dis donc ça doit en faire des sandwichs ! »

On est en train de jouer à saute-mouton avec les deux rives de la Creuse, et vas-y qu'on monte par ci et qu'on descend par là, et on fait même le col du Pilori 252 m. Gargilesse, un des plus beaux villages de France, Lac de Chambon, premier barrage hydroélectrique de France. Allez encore une grimpette pour arriver au musée de la vallée de la creuse à Eguzon, puis à St Benoît du Sault. 30x23 après le passage du pont roman sur le portefeuille, village médiéval également parmi les plus beaux villages de France, le pointage BPF.

Un rafraîchissement et un petit encas s'imposent au point accueil, mais il ne reste plus grand-chose, faut dire que nous arrivons un peu tard.

« Tiens salut Marco ! Ben dis donc on dirait que tu ne fais plus beaucoup de vélo ! T'es arrivé à monter ici sans mettre pied à terre ? Ah ! Ah ! Le salaud. Eh ! Regarde on dirait le vélo à Jojo ! T'as raison. Eh ! Grand, qu'est ce que tu fous ? J'cherche de l'eau et pis j' rentre direct, j'en ai mare, y a trop de bosses. Tiens regarde qui arrive ! Max et Vincelette en tandem. Ça a été la montée ? Impeccable, on a prévu notre coup ! »

Roussines, toboggan jusqu'à Ceaulmont, ruines du château fort de la prune au pot, on poursuit entre chaume et forêt vers le site archéologique d'Argentomagus, ville gallo romaine du IIe siècle, c'est bizarre ! l'on rencontre très peu de cyclotouristes… Ils ont peut être fait comme Jojo.

Arthon et ses châteaux, pas d'arrêt sur le dernier lieu d'accueil du parcours, il est trop tard, on traverse la forêt domaniale de Châteauroux par Le Poinconnet et allons conter notre journée à Marie Reine et n'irons pas à la case buvette non plus.

En soirée nous voyagerons encore au travers du Berry, Marie Reine nous a sorti le Berrichon du fond de son buffet pour donner de l'appétit puis nous dégusterons les œufs à la Couille d'Ane qui sera suivi d'un gigot de sept heures avec des truffiats, un Pouligny saint Pierre et en dessert un gouéron aux pommes tout ça arrosé d'un sancerre rouge. C'était booooooooooonnnnnnn ! Et puis on a aussi bien dormi.

jeudi 3 août

C'est la journée pique nique au village des amoureux, à St Valentin et le pot de Picardie ce soir qu'il ne faut pas oublier.

On flémarde, on déjeune avec Marie Reine, on finit le gâteau au barriaux.

Une longue colonne de cyclos, de tous ages, sur cette grande ligne droite ; on est dans la partie de la Champagne Berrichonne avec ses grands domaines céréaliers appelés "les Champs d'Amour" , en tandems, triplettes, vélos couchés et même un mono cycle.

Il faut vous dire que nous sommes en région Centre et qu'elle a toujours été le berceau du cirque, Amar, Pinder, des Alliés, etc… Son musée à Vatan patrie de Ferdinand de Lesseps, mérite une visite.

On fait une pause. Nous regardons passer tous ces cyclotouristes et prenons quelques clichés. Nous avons même droit à une distribution de prunes et tomates cerise, proposées par une dame, voûtée par son grand age, étonnée de voir autant de vélos. « J'ai fait beaucoup de vélo pendant la guerre et après, c'est bien que l'on fasse encore du vélo en 2006 et pis c'est bon pour la santé, avec un p'tit canon de Reuilly ! »

Oh que c'est joli ! Regarde la Poste, les fresques sur les murs, la boite aux lettres ! On parque nos montures puis on se dirige vers "le jardin des amoureux" se promener dans les allées, en dégustant un sandwich au fromage Berrichon, parmi des groupes de cyclos amoureux (de leur petite reine), installés sur les bancs, étalés sur les pelouses près du kiosque, œuvre d'art des compagnons du Tour de France, de l'arbre aux vœux….d'Amour .. ;

Diantre le ciel s'assombrit, on aura droit à une petite averse histoire de nous remettre les pieds sur terre. On arrivera sous la pluie au pot picard dans un immense bâtiment près de la piscine à la permanence. Nous ne sommes pas la seule Ligue à préparer un apéro. Daniel et la famille Angla s'affairent aux préparatifs. Les Picards affluent, on aperçoit de nouvelles têtes, et ceux attendus ne seront pas là. Madame la vice présidente nous accueille et fait son discours puis nous invite à lever nos "verres" à la santé des cyclos Picards, nous sommes entendus, la pluie redouble d'intensité. Nous levons nos gobelets, c'est de la sangria ! Ce n'est pas une spécialité du Berry ! Quand même !

Vendredi 4 août

Le val de l'Indre avec ses vallées creusées dans le calcaire, ses habitations troglodytiques et ses gâtines, un pays calme, tranquille et reposant où les fervents de pêche et de tourisme vert s'en donnent à cœur joie. Par sa rive gauche on atteint Buzançais dont les vieilles rues ont résonné des rivalités franco anglaise au moyen age.

Voilà « clochette » qui refait son numéro, « je ne t'ai pas encore vu au stand ! »

Au terme d'une petite grimpette on arrive à Palluau, avec son château fortifié, village bâti sur un éperon rocheux qui domine le val de l'Indre, on poursuit notre chemin en passant par Châtillon sur Indre avec ses ruelles tortueuses, ponctuées d'escaliers. Puis le parc de la Haute Touche avec ses 1200 pensionnaires à plumes ou à poils.

A deux tours de roues en bordure de la Brenne et de la forêt de Preuilly, Azay le Ferron, dominé par la haute silhouette de son château à grosse tour à mâchicoulis, son magnifique parc et ses jardins à la française où on prend le temps de regarder, avant de rentrer par de gentilles routes, entre Brenne et Indre, dénuées de difficulté.

Nous ferons une dernière pause à Villedieu, blottie autour de son château et de son église du XIe, dégusterons deux trois Brugnons sur la place publique, assis sur un banc, observerons le passage des cyclos et l'église en face avec une inscription peu commune au dessus du portail, "République Française".

Allez à deux coups de pédales on passe par la buvette, bonne idée que l'on a eue là, les cyclos de Crapeaumesnil, Creil, Villers, et Marco sont là ! Une dernière rincette et on y va car il ne s'agit pas de rentrer à pied.

Samedi 5 août

Au pays de George Sand, dernière virée bucolique en Berry, c'est jour de fête en vallée noire.

On partira directement sur le circuit de notre lieu d'hébergement, par la forêt domaniale de Châteauroux poser nos roues sur ceux de ses pas ou de ses chevaux entre sombres bocages, clos de haies boisées qui s'étendent à perte de vue. Pas énormément de cyclos sur le parcours. C'est magnifique avec le soleil, et calllllllllme !

Tiens ! Des roulottes ! Tirez par des chevaux, ça existe encore !

Sarzay, avec sa solide forteresse du XIVe qui se dresse au dessus du village, et cette admirable route qui serpente en bordure du lit de l'Indre, que l'on entend murmurer, elle nous emmène sur les coteaux de la rive droite de l'Indre à Sainte Sévère où l'on aperçoit les ruines du Donjon, puis sur la place du marché contempler la halle du XVIIe.

La fanfare est en pleine activité, la visite de la roulotte nous montre les photos du tournage du film de Jacques Tati, Jour de fête, en 1947.

On pointe le BPF puis on se dirige par une petite grimpée vers Montgivray espérant déjeuner mais nous ferons un écart sur le parcours car la population est dense. Nohant présente une pittoresque place où des ormes centenaires se pressent autour de l'église que précède un porche rustique.

Il abrite le château de George Sand. Pointage à l'office de tourisme et visite du parc.

On poursuit notre pèlerinage à Mers sur Indre par Condé, voir la mare au diable dans la forêt de Chanteloube signalée par un calvaire sur notre gauche. On poursuit notre progression sur le chemin, là voici cette mare. A droite au milieu du plan d'eau se dresse une croix en bois qui se reflète dans l'eau sombre. brrrr ! On en a des frissons dans le dos, tirons nous vite fait de cet endroit lugubre, retrouver nos esprits et boire un coup à Ardente dernier accueil sur la route du retour.

Ce soir c'est le repas de clôture, nous le ferons avec Marie Reine à "l'Escalier" en toute intimité, et goûterons les cuisines du monde, faut bien changer un peu sacrebleu !